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ŒUVRES EN PROSE

rage dans l’illusion qu’il n’est pas perdu à jamais pour elle.

« Elle avait l’habitude de se mettre à la fenêtre pour le voir, de se promener dans le parc pour le rencontrer, mais sans éprouver la moindre impatience de son retard. Elle apprenait un air nouveau, une chanson nouvelle pour le distraire ; elle se plaçait derrière la porte pour se montrer à lui à l’improviste, ou se déguisait pour le surprendre. »

Le rôle de Marie mérite, selon nous, d’être considéré comme la seule partie du livre qui soit tout à fait manquée. Toutes les autres femmes que l’auteur s’est attaché à décrire portent l’empreinte d’une individualité précise et naturelle. Ce sont des peintures de tout ce qu’il y a d’éminemment simple, gracieux, noble, ou de tout ce qui peut révolter par l’atrocité et la bassesse. Marie seule est la misérable parasite de la mode, l’esclave docile de la sottise cancanière et buveuse, la coquette au cœur froid, la prude menteuse et courtisane. Les moyens mis en usage pour gagner ce gros lot sans valeur sont en harmonie parfaite avec son indignité. Sir Fulke Hildebrand est un Tory convaincu ; Alexy, à son arrivée en Angleterre, déclare ses préférences pour les principes du parti whig, lorsqu’il découvre que le baronnet a juré que sa fille n’épouserait jamais un Whig, il sacrifie ses principes, et avec une inconcevable effronterie, il excuse ainsi son apostasie et sa fausseté.

« Les préjugés du baronnet étaient d’autant plus forts qu’ils étaient plus déraisonnables. Je pris