Page:Shelley - Œuvres en prose, 1903, trad. Savine.djvu/197

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
180
ŒUVRES EN PROSE

brillantes, tenaient en respect la foule amassée pour assister à cet abominable spectacle.

« Quand on entendit le bruit que faisait le coup de hache, il y eut une explosion d’horreur dans la foule[1]. Au moment où on lui montra la tête, un cri formidable se fit entendre, et la multitude se mit à courir éperdument de tous côtés, comme sous l’impulsion d’une soudaine folie. Ceux qui reprirent leur place, grogneront et poussèrent des hou ! hou ! »

C’est une calamité nationale que nous nous laissions gouverner par des hommes qui encouragent dans un but, quel qu’il soit, une conspiration qui ne saurait atteindre son objet qu’à travers une horrible effusion de sang et de souffrances.

Mais quand ce but est de fouler aux pieds pour toujours nos droits et nos libertés, de nous présenter l’alternative entre l’anarchie et l’oppression, de triompher quand la nation frappée de stupeur accepte de leurs mains la dernière alternative, de maintenir une nombreuse armée permanente, d’accroître d’année en année une dette publique, qu’ils savent déjà impossible à payer, et qui, dès l’effondrement de l’illusion qui la soutient, produira dans toutes les classes de la société autant de misère et de désordre qu’elle a produit incessamment de privations et de dégradation dans la classe pauvre et sans défense ; d’emprisonner et de calomnier à plaisir ceux qui peuvent lui déplaire, quand tout cela, est sinon le but, du moins le résultat de cette conspiration, alors ne devrions pas porter le deuil ?

  1. Ces expressions sont empruntées à L’Examiner du dimanche 9 novembre (Note de l’auteur).