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ŒUVRES EN PROSE

souffrances actuelles ou futures de leurs victimes.

Rien n’est plus horrible que ceci, qu’un homme verse, pour quelque cause que ce soit, le sang d’un autre homme.

Pour toutes les autres calamités, il existe un remède ou une consolation.

Quand cette faculté, grâce à laquelle nous vivons, cesse d’entretenir l’existence qu’elle a donnée, alors il y a souffrance, torture. C’est alors un poids qu’il faut supporter ; un tel chagrin rend le cœur meilleur. Mais lorsque l’homme verse le sang de l’homme, la vengeance, la haine, une longue série d’exécutions et d’assassinats, et de proscriptions se perpétue jusqu’à un avenir très reculé.


VII


Telles sont les réflexions particulières, jointes à quelques-unes des réflexions générales que suggère la mort de ces hommes. Mais si déplorable qu’elle soit, si elle était un sujet de chagrin privé ou accoutumé, le public, en tant que public, n’aurait point à s’en émouvoir.

Il y a quelque chose de plus que cela.

Les événements qui ont abouti à la mort de ces infortunés sont une calamité publique.

Je ne veux pas infliger un blâme au jury qui les a déclarés coupables de haute trahison ; peut-être la loi exige-t-elle qu’on qualifie ainsi leur faute.