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Allez, cherchez un peu d’eau, et effacez de votre main ce hideux témoignage. Pourquoi avez-vous retiré ces poignards de la chambre ? ils doivent y rester ; rapportez-les-y, et barbouillez de sang les valets endormis.

MACBETH. — Je n’y retournerai pas : j’ai peur en pensant à ce que j’ai fait ; quant à le contempler encore, je n’ose pas.

LADY MACBETH. — Oh, le courage infirme ! Donne-moi les poignards : les gens morts et les gens endormis ; ne sont que des peintures : c’est l’œil de l’enfance qui redoute un diable peint. S’il saigne, je frotterai de son sang les visages des valets, car ce crime doit sembler venir d’eux. (Elle sort. On entend frapper à la porte.)

MACBETH. — Qui peut frapper ? Comment se fait-il que tout bruit m’effraye ? Quelles mains sont celles-là ? Ah ! elles arrache mes yeux ! Tout l’océan du grand Neptune pourrait-il laver ce sang qui tache ma main ? non, mais ma main teindrait plutôt en incarnat les mers immenses, et de te vert infini ferait un rouge infini.

Rentre LADY MACBETH.

LABY MACBETH. — Mes mains sont de la couleur des vôtres, mais je serais honteuse de porter un cœur si blanc. (On frappe.) J’entends frapper à la porté du sud : retirons-nous dans notre chambre : un peu d’eau nous lavera de cet acte : combien la chose est facile alors ! Votre fermeté vous a faussé compagnie. (On frappe.) Écoutez ! oh frappe encore : allez mettre vôtre robe de nuit, de crainte que si une circonstance nous appelle, nous ne paraissions avoir veillé : — ne restez pas là perdu si piteusement dans vos pensées.

MACBETH. — Il vaudrait mieux pour moi ne pas me connaître que de connaître l’acte que j’ai commis. (On frappe.) Réveille Duncan avec ton tapage ! Oh, si tu le pouvais ! (Ils sortent !)