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LADY MACBETH. — Donalbain.

MACBETH. — C’est douloureux à voir. (Il regarde ses mains.)

LADY MACBETH. — Sotte idée que de dire, c’est douloureux à voir.

MACBETH. — Il y en a un qui a ri dans son-sommeil, et un autre qui a crié au meurtre ! de sorte qu’ils se sont éveillés l’un l’autre : je me suis arrêté et je les ai écoutés ; mais ils ont dit leurs prières, et se sont remis à dormir.

LADY MACBETH. — Il y en a deux de logés ensemble.

MACBETH. — Un a crié : Dieu nous bénisse ! et l’autre a crié : Amen, comme s’ils m’avaient vu avec ces mains de bourreau. Pendant que je prêtais l’oreille à leurs frayeurs, je n’ai pu répondre Amen, lorsqu’ils ont dit Dieu nous bénisse !

LADY MACBETH. — Ne prenez pas la chose si fort à cœur.

MACBETH. — Mais pourquoi n’ai-je pas pu prononcer Amen ? J’avais’cependant bien besoin de bénédiction, et Amen m’est resté collé à la gorge.

LADY MACBETH. — Ces actes-là ne doivent pas être considérés de cette manière ; pris de la sorte, cela nous rendra fous.

MACBETH. — Il m’a semblé que j’entendais une voix crier : « Ne sommeille plus ! Macbeth tue le sommeil ! » l’innocent sommeil, le sommeil qui répare l’étoffe de notre vie déchirée par le souci, la mort de l’existence de chacune de nos journées, le bain du dur travail, le baume des âmes malades, le second agent de la grande nature, le principal nourricier du festin de la vie

LADY MACBETH. — Que voulez-vous dire ?

MACBETH. — Et cette voix continuait à crier à travers toute la maison : « Ne sommeille plus ! Glamis a tué le sommeil, et c’est pourquoi Cawdor ne sommeillera plus, Macbeth ne sommeillera plus ! »

LADY MACBETH. — Qui était-ce donc qui criait ainsi ? Vraiment, noble thane, vous offensez votre fier courage en jugeant des choses avec une imagination si malade.