Page:Shakespeare - Œuvres complètes, traduction Montégut, Hachette, 1871, tome 8.djvu/409

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droit sa passion ou son ambition personnelle, toujours injuste, même lorsque sa cause est la bonne cause par l’abus qu’il fait de la force. Voilà le chef de clan, le grand seigneur écossais tel que l’histoire nous le présente à toutes les époques, sous sa forme la plus primitive et la plus barbare.

« Comme tous les détails de la pièce sont bien en harmonie avec ce caractère sinistre ! le paysage et la poésie de Macbeth sont écossais comme le héros même. La nature, toujours si variée et si riante dans Shakespeare, ne se révèle dans cette pièce que sous ses aspects les plus noirs, la nuit, le crépuscule, l’orage ; elle n’y fait entendre que ses voix les plus menaçantes, le cri du loup, la plainte de la chouette, l’aboiement du chien. Une seule fois elle semble vouloir sourire ; mais ce sourire n’est qu’un rayon de douce-mélancolie, semblable à un pressentiment de malheur. Le poêle nous fait respirer cet air salubre et vif qui circule autour du château de Macbeth, et nous montre les nids des martinets attachés à ses flancs, symbole populaire du respect dû à cette vertu de l’hospitalité qui va être si odieusement violée ; puis toute lumière s’éteint, et l’orage éclate, accompagnement légitime des tempêtes infernales qui brisent l’âme de Macbeth.

« Après l’écossais, le féodal. Les mœurs et la tournure de caractère résultant de la féodalité sont marquées dans Macbeth par une circonstance toute particulière : la nature et l’intensité de ses terreurs. Nous voyons et nous comprenons par les exemples de Macbeth et de sa femme, de quel poids pesait un remords, sur une âme du moyen âge. Nous saisissons sur le fait la force corrosive de ces secrets des maisons féodales que les poêles et les chroniqueurs nous montrent se transmettant de père en fils comme un legs de malédiction, comme une maladie héréditaire qui mine la famille et finit par la détruire. Le remords sous la forme où nous le voyons chez Macbeth et