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lorsque le temps aura tacheté de gris ta fourrure ? ou plutôt ta duplicité ne grandira-t-elle pas si vite que tu trouveras ta perte dans sa rapide croissance ? Adieu, prends-la, mais dirige tes pas en un lieu où nous ne puissions désormais nous rencontrer, toi et moi.

Viola. — Monseigneur, je proteste.

Olivia. — Oh ! ne jure pas ! garde un peu de foi, quoique tu aies si peur.

Entre Messire ANDRÉ AGUECHEEK, la tête bandée.

Messmie André. — Pour l’amour de Dieu, un chirurgien ! et envoyez-en un immédiatement à Messire Tobie.

Olivia. — Qu’y a-t-il ?

Messire André. — II m’a fendu la tète et il a donné aussi à Messire Tobie un mauvais coup : pour l’amour de Dieu, assistez-moi ! je donnerais plus de quarante livres pour être chez moi.

Olivia. — Qui a fait cela, Messire André ?

Messire André. — Le gentilhomme du comte, un certain Césario : nous l’avions pris pour un couard, mais c’est le diable incardiné lui-même.

Le Duc. — Césario, mon gentilhomme ?

Messire André. — Mort de ma petite existence, le voici ! Vous m’avez fendu la tête pour rien ; ce que j’ai fait, c’est Messire Tobie qui m’avait poussé à le faire.

Viola. — Pourquoi me parlez-vous ? je ne vous ai jamais blessé : vous avez tiré votre épée contre moi sans raison ; mais je vous ai parlé avec politesse et je ne vous ai pas blessé.

Messire André. — Si une taloche à faire sortir le sang est une blessure, vous m’avez blessé : je présume que cela ne vous coûte rien de donner des taloches à faire sortir le sang. Voici Messire Tobie qui s’avance en boitant, vous allez en apprendre davantage ; mais s’il n’avait pas été ivre, il vous aurait chatouillé autrement qu’il n’a fait.

Entre Messire TOBIE BELCH ivre, conduit par le Bouffon.

Le Duc. — Eh bien, gentilhomme, qu’y a t-il donc ?