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ACTE V, SCÈNE IV. 179

SCÈNE IV.

Une autre partie de la forêt.

Entre VALENTLN.

VALENTIN. — Comme sous l’empire d’un mode constant d’existence, l’habitude grandit vite dans l’homme ! Ces bois ombreux, déserts, solitaires me plaisent mieux que les villes florissantes et peuplées. Ici je puis m’asseoir Jtout seul, sans être vu de personne, et répondre aux notes plaintives du rossignol par les soupirs de ma détresse et le récit de mes malheurs. 0 toi qui habites dans mon cœur, ne reste pas si longtemps sans faire séjour dans ta demeure, de crainte que sa ruine croissant par ton absence, l’édifice ne s’écroule et ne laisse aucun souvenir de ce qu’il était ! Restaure-moi par ta présence, Silvia ! Aimable nymphe, montre-toi charitable pour ton berger délaissé ! (Un bruit se fait entendre !) Qu’est-ce que ce vacarme et cette agitation aujourd’hui ? Mes compagnons, qui pour toute loi ont les désirs de leur volonté, donnent sans doute la chasse à quelque malheureux voyageur. Ils m’aiment bien ; cependant j’ai beaucoup à faire pour les empêcher de se porter à des outrages grossiers. Qui donc vient ici ? Retire-toi ; Valentin.

(Il se retire à l’écart.)

Entrent PROTÉE, SILVIA et JULIA.

PROTÉE.—Madame, bien que vous n’ayez aucun égard pour ce que peut faire votre serviteur, je vous ai rendu ce service d’exposer ma vie et de vous arracher des mains de cet homme, qui aurait outragé votre honneur et votre amour. Accordez-moi pour récompense un seul de vos. beaux regards. Je ne puis demander, et, j’en suis sûr, vous-même ne pouvez accorder une moindre faveur que celle-là.