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ACTE IV, SCÈNE II. 165

THURIO. — Où nous retrouverons-nous ? PROTÉE. — À la fontaine Saint-Grégoire. THURIO. — Adieu.

(Sortent Thurio et les musicietis.)

SILVIA paraît a sa fenêtre.

PROTÉE. — Madame, je souhaite le bonsoir à Votre Seigneurie.

SILVIA. — Je vous remercie de votre musique, Messieurs. Qui vient de parler ?

PROTÉE. — Un homme, Madame, dont vous apprendriez bien vite à distinguer la voix si vous connaissiez la pure sincérité de son cœur.

SILVIA. — Messire Protée, je crois ?

PROTÉE. — Messire Protée et votre serviteur, gracieuse dame.

SILVIA. — Quel est votre désir ?

PROTÉE. — De pouvoir accomplir les vôtres.

SILVIA. — Votre souhait est exaucé ; mon désir est que vous alliez immédiatement vous mettre au lit chez vous. Homme artificieux, parjure, fourbe, déloyal ! Me crois-tu donc assez sotte, assez vaine, pour être séduite par tes flatteries, toi dont les serments en ont tant trompé ? Va-t’en, va-t’en faire à ton amour les réparations que tu lui dois. Pour moi, je jure par cette pâle reine de la nuit, que je suis si loin de vouloir accéder à ta requête, que je te méprise pour tes coupables poursuites, et que tout à l’heure je vais me gronder moi-même pour le temps que je perds maintenant à te parler.

PROTÉE. — J’avoue, douce bien-aimée, que j’aimais une dame ; mais elle est morte.

JULIA, à part. — Cela se trouverait faux si je voulais parler ; car je suis sûre qu’elle n’est pas enterrée.,

SILVIA. — Supposons qu’elle le soit ; mais Valentin, ton ami, est vivant ; Valentin, auquel je suis fiancée, ainsi que tu en es témoin ; n’as-tu pas honte de l’outrager par les importunités dont tu me poursuis ?

PROTÉE. — J’entends dire aussi que Valentin est mort.