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EXTRAIT DES ŒUVRES ITALIENNES DU BANDEL.

repentirez de votre faute, et ne sais si ce sera trop tard, n’ayant ni celle qui vous fuit, ni celle qui vous désire.

Lactance oyant ceci fut tout ébahi, et enquis qu’il s’est de sa Catelle, l’autre l’assure sur sa foi qu’elle avait pris ailleurs parti : au reste lui demanda, si Nicole l’aimait encore, s’il voudrait point entendre à l’avoir pour épouse.

— Ah ! dit-il en soupirant, je l’ai tant offensée, la méprisant comme je l’ai fait, en ne tenant compte de ses lettres, étant lié et charmé ailleurs comme j’étais, que je ne pense point qu’elle daignât me regarder pour m’aimer ou favoriser.

— Mais que diriez-vous si elle a été en votre maison et usé en votre endroit de tout tel service que saurait faire le moindre serviteur, pour tâcher d’acquérir votre grâce, et ôter à une autre ce que justement elle seule mérite ?

— Si cela est vrai (dit-il), je m’estime tant obligé en son endroit, que ne vois récompense plus digne pour satisfaire à telle obligation que de la rendre dame de moi et de mes biens.

— C’est parler en homme de bien, répond la nourrice.

Et soudain elle appela Nicole, et fit porter son habit de page, afin de montrer au jeune homme la pure et ferme amitié de cette fille.

— Voici, dit la nourrice, votre Nicole, voyez Romule, votre page tant désiré, lequel pour l’amour de vous oubliant son rang et hazardant sa vie et son honneur vous a servi si longuement, sans que l’amour vous ait fait connaître ce que vous aviez de rare en votre compagnie.

L’amant transporté d’étonnement, demeurait aussi immobile que ce grand jeûneur qui est au parvis Notre-Dame de Paris, ou que le Marfoire de Rome, et ne savait