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APPENDICE.

fit grand caresse, disant que s’il eût été en ville ces jours passés, ils eussent conclu sur le mariage de sa fille, le priant d’y penser, et ne le tenir si longuement en attente, mais lui en éclairât le fait ou failli. Ambroise répond qu’encore n’avait-il pas été jusques à sa maison, mais que lui étant de repos, ils auraient loisir d’en parler tout à leur aise. Comme ils parlaient ensemble, voici le page féminin de Lactance qui s’en venait faire son message à Catelle, mais voyant son père de retour, en lieu de parfaire sa pointe, et exécuter sa charge, elle doubla chemin, et sien courut au plus qu’il lui fut possible chez sa nourrice, et lui conta, toute éperdue, la venue de son père, se disant ruinée, ne sachant plus presque que devenir. Mais la vieille lui donna cœur, et l’assura de toutes ses craintes, puisque son heur l’avait conduite jusque là, que son père n’était point encore descendu de cheval. Et l’ayant revêtue de ses habits, la vieille s’en alla soudain au logis du père, lequel la voyant lui fit une grande fête et s’enquit de sa fille : de laquelle l’autre lui dit les meilleures nouvelles du monde, et que souvent elle l’avait visitée et menée en sa maison, et que la pauvre fille était toute en souci ne le voyant point, au reste lui dit que, s’il le trouvait bon, elle l’irait quérir au monastère pour la lui mener, l’ayant tenue quelque jour avec elle pour voir si elle aurait quelque nécessité. Le bonhomme qui pleurait de joie, voyant l’amitié que sa fille lui portait et le profit qu’elle avait fait entre les dames à bien coudre, et besogner en tapisserie, se rapporta à la nourrice du tout, l’estimant plus curieuse de l’honneur de sa fille que de sa vie propre. La nourrice, arrivée que fut à sa maison, dit à la fille, qu’elle s’apprêtât pour s’en aller chez son père dans un jour ou deux, ce qu’elle trouva de fort dure digestion, à cause qu’elle se faisait forte de dégoûter tellement Catelle de