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LE SOIR DES ROIS ou CE QUE VOUS VOUDREZ.

pour le bien jouer, il a besoin d’une sorte d’esprit : — il doit observer l’humeur de ceux qu’il plaisante, — la qualité des personnes et le moment, — en se jetant, comme le faucon hagard, sur la moindre plume — qui passe devant ses yeux. C’est un métier — certes aussi ardu que l’état du sage ; — car la folie, dont il ne fait montre que sagement, est ingénieuse ; — tandis que les sages, une fois tombés dans la folie, perdent toute raison.

Entrent sir Tobie Belch et sir André Aguecheek.
sir tobie

Salut, gentilhomme !

viola.

Salut, monsieur.

sir tobie

Dieu vous garde, monsieur.

viola.

Et vous aussi ; votre serviteur.

sir andré.

J’espère que vous l’êtes, monsieur, comme je suis le vôtre.

sir tobie.

Voulez-vous vous hasarder dans la maison ? Ma nièce désire que vous entriez, si vous avez affaire à elle.

viola.

Votre nièce est ma destination, monsieur, je veux dire qu’elle est le but de mon voyage.

sir tobie.

Tâtez vos jambes, monsieur, mettez-les en mouvement,

viola.

Je suis mieux sur mes jambes, monsieur, que ne l’est votre phrase quand vous me dites de tâter mes jambes.