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SCÈNE II.

la cour, — était brisé en deux ; par qui ? je l’ai oublié, — mais je crois que c’était par le cardinal. — Et aux fragments de la verge brisée — étaient fixées les têtes d’Edmond, duc de Somerset, — et de William de la Poole, premier duc de Suffolk. — Tel était mon rêve : ce qu’il présage, Dieu le sait.

la duchesse.

— Bah ! tout ce que cela prouve, — c’est que celui qui brisera un rameau du bosquet de Glocester — paiera de sa tête sa présomption. — Mais écoute, mon Homphroy, mon cher duc : — il m’a semblé que j’étais assise sur un siége de majesté, en l’église cathédrale de Westminster, — dans le fauteuil même où sont couronnés les rois et les reines ; — et qu’alors Henry et dame Marguerite s’agenouillaient devant moi, — et me mettaient le diadème sur la tête.

glocester.

— Çà, Éléonore, il faut donc que je me fâche tout de bon. — Présomptueuse créature, dénaturée Éléonore, — n’es-tu pas la seconde femme du royaume, — et l’épouse bien-aimée du protecteur ? — N’as-tu pas à commandement plus de jouissances mondaines — que ta pensée n’en peu concevoir ou embrasser ? — Et cependant tu te mets la trahison en tête — pour précipiter ton mari et toi-même — du faîte de l’honneur aux pieds de la disgrâce ? — Éloigne-toi, et que je ne t’entende plus !

la duchesse.

— Quoi ! quoi ! milord, vous vous mettez ainsi en colère — contre Éléonore pour un rêve qu’elle vous dit ! — Dorénavant je garderai mes rêves pour moi, — pour ne pas être grondée.

glocester.

Allons, ne te fâche pas ; je m’apaise.