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SCÈNE X.

deuxième garde-chasse.

— Je vais me poster au haut de la côte, en sorte que nous puissions tirer tous deux.

premier garde-chasse.

— Ça ne se peut pas ; le bruit de ton arbalète — effarouchera la bande, et mon coup sera perdu — Embusquons-nous tous deux ici, et visons le plus beau ; — et, pour que le temps ne te semble pas trop long, — je te conterai ce qui m’est arrivé un jour, — à cette même place où nous allons nous embusquer.

deuxième garde-chasse.

— Voici un homme qui vient : attendons qu’il soit passé.


Entre le roi Henry, déguisé, un livre de prières à la main (44).
le roi henry.

— Je me suis dérobé de l’Écosse par pur amour de la patrie, — pour saluer mon pays d’un sympathique regard. — Non, Harry, Harry, ce pays n’est plus à toi. — Ta place est occupée, ton sceptre est arraché de tes mains, — le baume dont tu étais oint est effacé. — Désormais nul genou plié ne te proclamera César, — nul humble solliciteur ne s’empressera pour t’exposer ses droits ; — non, nul ne viendra te demander justice, — car comment pourrais-tu aider autrui, ne pouvant t’aider toi-même ?

premier garde-chasse, à part.

— Eh ! voici un daim dont la peau est une fortune pour un garde-chasse ; — c’est le ci-devant roi ; saisissons-le.

le roi henry.

— Embrassons cette amère adversité ; — car les sages disent que c’est le parti le plus sage.

deuxième garde-chasse, à part.

— Pourquoi hésitons-nous ? mettons la main sur lui.

premier garde-chasse, à part.

— Attends un peu ; nous allons l’écouter encore.