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SCÈNE X.

suffolk.

— Je n’ai pas de couteau pour égorger les gens endormis ; — mais voici une épée vengeresse, rouillée par l’inaction, — que je fourbirai dans le cœur haineux du calomniateur qui m’inflige le stigmate cramoisi de l’assassin. — Ose donc dire, fier lord de Warwikshire, — que je suis coupable de la mort du duc Homphroy.

Sortent le Cardinal, Somerset et d’autres.
warwick.

— Que n’osera pas Warwick, si le perfide Suffolk ose le défier ?

la reine marguerite.

— Il n’oserait pas contenir son outrageante humeur — ni mettre un terme à ses arrogantes censures, — quand Suffolk oserait vingt mille fois l’en défier.

warwick.

— Madame, gardez le silence, je vous le conseille respectueusement ; — car chaque parole que vous dites en sa faveur — porte atteinte à votre royale dignité.

suffolk.

— Lord brutal d’esprit, ignoble d’allure ! — si jamais dame outragea son seigneur à ce point, — c’est ta mère qui a reçu dans son lit criminel — quelque manant grossier et mal-appris, et sur une noble tige — greffé un sauvageon : tu en es le fruit. — Tu n’es point de la noble race des Nevils.

warwick.

— Si le crime de meurtre ne te couvrait pas, — si je ne craignais de frustrer le bourreau de son revenu — et de te soustraire ainsi à dix mille hontes, — si la présence de mon souverain ne m’imposait le calme, je te forcerais, meurtrier fourbe et couard, — à me demander pardon à genoux de ce que tu viens de dire, — et à déclarer que c’est de ta mère que tu parlais — et que c’est toi, toi-même, qui