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CORIOLAN ET LE ROI LEAR.

mun, là où toutes les autres parties soutenaient de grands travaux, et faisaient de laborieux services pour fournir à ses appétits ; mais que le ventre se moqua de leur folie, pour ce qu’il est bien vrai, disait-il, que je reçois le premier toutes les viandes et toute la nourriture qui fait besoin au corps de l’homme, mais je la leur renvoie et distribue puis après entre eux. Aussi, dit-il, seigneurs citoyens romains, pareille raison y a-t-il du Sénat envers vous ; car les affaires qui y sont bien digérées et les conseils bien examinés sur ce qui est utile et expédient pour la chose publique, sont cause des profits et des biens qui en viennent à un chacun de vous. »

Ces remontrances les adoucirent, moyennant que le Sénat leur octroya que par chacun an s’éliraient cinq magistrats qu’on appelle maintenant les tribuns du peuple, lesquels auraient charge de soutenir et défendre les pauvres qu’on voulait fouler et opprimer. Ils furent élus les premiers tribuns ceux qui avaient été auteurs et conducteurs de cette sédition, Junius Brutus et Sicinius Velutus. »

(4) « Et comme aux autres la fin qui leur faisait aimer la vertu était la gloire, aussi à lui la fin qui lui faisait aimer la gloire, était la joie qu’il voyait que sa mère en recevait ; car il estimait n’y avoir rien qui le rendît plus heureux ni plus honoré que de faire que sa mère l’ouït priser et louer de tout le monde, et le vît retourner toujours couronné, et qu’elle l’embrassât à son retour ayant les larmes aux yeux épreintes de joie ; laquelle affection on dit qu’Épaminondas avoua et confessa semblablement être en lui, réputant son principal et plus grand heur être que son père et sa mère vivant avaient vu la victoire qu’il gagna en la plaine de Leuctres. Or, quant à Épaminondas, il eut ce bien-là d’avoir ses père et mère vivant, participant à sa joie et à sa prospérité. Mais Marcius estimant devoir à sa mère ce qu’il eût encore dû à son père, s’il eût été vivant, ne se contenta pas de la réjouir et honorer seulement, mais à son instance et prière il prit femme de laquelle il eut des enfants, sans toutefois se départir jamais d’avec sa mère. »