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SCÈNE IX.

lear.

Non, te dis-je.

kent.

Je vous dis que oui.

lear.

Non, non, ils ne feraient pas cela (43).

kent.

Oui, ils l’ont fait.

lear.

Par Jupiter, je jure que non.

kent.

Par Junon, je jure que oui.

lear.

Ils n’auraient pas osé le faire ; — ils n’auraient pas pu, ils n’auraient pas voulu le faire. C’est pis qu’un assassinat — de faire au respect un si violent outrage. — Réponds-moi avec toute la promptitude raisonnable : comment — as-tu pu mériter, comment as-tu pu subir un pareil traitement, — venant de notre part ?

kent.

Seigneur, je venais d’arriver chez eux — et de leur remettre la lettre de Votre Altesse ; avant même que j’eusse redressé l’attitude — de mon hommage agenouillé, est survenu un courrier fumant — et ruisselant de sueur : à demi essoufflé, il a balbutié — les compliments de Goneril sa maîtresse, — et a présenté une lettre que, sans souci de mon message, — ils ont lue immédiatement. Sur son contenu, — ils ont réuni leurs gens, sont vite montés à cheval, — m’ont commandé de les suivre et d’attendre — le loisir de leur réponse, en me jetant un regard glacial. — Ici, j’ai rencontré le messager — dont l’ambassade avait empoisonné la mienne : — c’est ce même drôle qui, dernièrement, s’est montré si insolent envers Votre Altesse. — Écoutant mon sentiment plus que ma réflexion, j’ai dégaîné : — le lâche