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LE ROI LEAR.

glocester.

Qu’il fuie à sa guise ! — Il n’échappera pas aux poursuites en ce pays ; — et une fois pris, expédié ! Le noble duc, mon maître, — mon digne chef et patron, arrive ce soir : — de par son autorité, je ferai proclamer — que ma reconnaissance attend quiconque découvrira — le lâche assassin et le livrera à l’échafaud. — Quiconque le cachera, à mort !

edmond.

— Quand, en dépit de mes avis, — je l’ai trouvé inébranlable dans sa résolution, je l’ai, dans les termes les plus véhéments, — menacé de tout découvrir. Il m’a répondu : « Bâtard déshérité ! crois-tu — que, si je te donnais un démenti, l’ascendant — de ta loyauté, de ta vertu, ou de ton mérite, suffirait — à donner créance à tes paroles ? Non ! Avec une simple dénégation — (et je nierais la chose, quand tu produirais — ma propre écriture), j’imputerais tout — à tes suggestions, à tes complots, à tes damnés artifices ! — Il faudrait que le monde entier fût ta dupe, — pour ne pas s’apercevoir que les profits espérés de ma mort — sont les stimulants énergiques et puissants — qui te la font chercher ! »

glocester.

Rare et fieffé scélérat ! — Il nierait donc sa lettre !… Il n’est pas né de moi…

Fanfares.

— Écoutons ! les trompettes du duc ! Je ne sais pourquoi il vient. — Je ferai fermer tous les ports : le misérable n’échappera pas. — Il faut que le duc m’accorde cela. En outre, je veux — envoyer partout son signalement, afin que le royaume entier — puisse le reconnaître. Et quant à ma succession, — ô mon loyal, mon véritable enfant, je trouverai moyen — de te la rendre accessible.