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RICHARD II.

SCÈNE XIV.
[Aux abords de la tour de Londres.]
Entrent la Reine et quelques dames.
la reine.

— Le roi passera par ici. Voici le chemin — qui mène à cette affreuse tour de Jules César, — dont le sein de pierre est la prison assignée — par le fier Bolingbroke à mon seigneur condamné. — Reposons-nous ici, si cette terre rebelle — permet encore le repos à la femme de son roi légitime.


Entre Richard, conduit par des gardes.

— Mais doucement ! regardez, ou plutôt ne regardez pas — se flétrir ma belle rose… Mais non, levez les yeux, considérez-la, — de sorte que, vous épanchant en une rosée de pitié, — vous puissiez la raviver avec des larmes d’amour !… — Ô toi, image du désert où fut l’antique Troie, — mappemonde de l’honneur, tombe du roi Richard, — et non plus le roi Richard, magnifique hôtellerie, — pourquoi la hideuse douleur est-elle logée chez toi, — quand le triomphe est devenu l’hôte d’un cabaret ?

richard.

— Femme charmante, ne te ligue pas avec la douleur — pour précipiter ma fin. Apprends, chère âme, — à ne voir dans notre première condition qu’un rêve heureux — dont nous nous sommes éveillés pour connaître enfin — notre état réel. Ô ma mie, je suis le compagnon inséparable — du sinistre destin ; et lui et moi — nous resterons unis jusqu’à la mort. Cours en France, — et va te cloîtrer dans quelque maison religieuse. — Il nous faut, par une sainte exis-