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RICHARD II.

richard, à Northumberland.

— Nous sommes stupéfaits ; nous avons attendu jusqu’ici — que tu fléchisses un genou tremblant — devant nous qui croyions être ton roi légitime. — Si nous le sommes, comment tes jarrets osent-ils oublier — de rendre à notre présence leur respectueux devoir ? — Si nous ne le sommes pas, montre-nous la main divine — qui nous a destitué de notre office ; car nous savons bien que nulle main de chair et d’os — ne peut saisir la poignée sacrée de notre sceptre, — sans profanation, vol ou usurpation. — Peut-être croyez-vous que, comme vous, tous — ont fait violence à leur âme pour la détourner de nous, — et que nous sommes isolé et dénué d’amis ; — mais sachez que mon maître, le Dieu omnipotent, — assemble, dans les nues, en notre faveur, — des armées de fléaux, qui frapperont — vos enfants encore à naître, — tandis que vous levez vos mains vassales contre ma tête, — et que vous menacez la gloire de ma précieuse couronne. — Dites à Bolingbroks (car c’est lui, je crois, que je vois là-bas) — que chaque pas qu’il fait sur mon territoire — est une dangereuse trahison. Il est venu ouvrir — l’écarlate testament de la guerre saignante ; — mais avant qu’il possède en paix la couronne à laquelle il aspire, — dix mille couronnes sanglantes, dix mille crânes de fils enlevés à leurs mères, — dépareront la face en fleurs de l’Angleterre, — changeront la sereine pâleur de la paix virginale — en pourpre furieuse, et inonderont — du sang anglais le plus loyal, l’herbe de nos prairies !

northumberland.

— Au roi des cieux ne plaise que notre seigneur le roi — soit ainsi assailli par une guerre — civile et incivile ! Ton trois fois noble cousin, — Harry Bolingbroke, baise humblement ta main ; — il jure par la tombe ho-