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APPENDICE.

— Et pourquoi en danger, dit Juriste ? Vous êtes par aventure telle que vous ne devez penser qu’ainsi doive être. Avisez-y bien, et j’attendrai demain votre réponse.

— Je vous réponds, dit-elle, dès à présent, que si vous ne me prenez à femme, pourvu que vous vouliez que la délivrance de mon frère en dépende, vous perdrez votre peine.

Juriste lui répliqua qu’elle y pensât, et qu’il pouvait beaucoup pour elle et pour les siens, ayant en main, en ce lieu, la justice et la force.

Épitia s’en alla toute fâchée à son frère, et lui dit ce qui était advenu entre elle et Juriste, concluant qu’elle ne voulait perdre son honneur pour lui sauver la vie : en pleurant le pria se disposer à endurer patiemment ce que le destin ou sa mauvaise fortune lui apporterait.

En cet endroit Vico se mit à pleurer, et à prier sa sœur de ne consentir à sa mort, pouvant le délivrer en la manière que le gouverneur lui avait proposée.

— Cela est impossible, dit-elle.

— Ah ! ma sœur, je vous prie que les lois de nature, du sang, et de l’amitié, qui a toujours été entre nous, puissent tant en votre endroit, que vous me délivriez, puisque vous le pouvez faire, d’une tant infâme et misérable fin. J’ai failli, je le confesse : je vous prie, ma sœur, qui pouvez corriger mon erreur, ne me refusez votre aide ; Juriste vous a dit qu’il vous pourrait prendre à femme ; et pourquoi ne devez-vous penser qu’il doive être ainsi ? Vous êtes belle, ornée de toutes les grâces que la nature peut donner à une gentille femme ; vous êtes gentille et avenante ; vous avez une merveilleuse manière de parler ; ce qui peut vous faire aimer, non-seulement de Juriste, mais aussi de l’empereur du monde. Et pour cette cause, vous ne devez douter que Juriste ne vous prenne à femme ; et