Page:Shakespeare - Œuvres complètes, traduction Hugo, Pagnerre, 1872, tome 10.djvu/320

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
316
TIMON D'ATHÈNES.

dis-les tous ; n’aie de charité pour aucun. — Avant de secourir le mendiant, laisse la chair affamée — tomber de son squelette. Donne aux chiens — ce que tu refuses aux hommes. Que les prisons les dévorent ! — Que les dettes les flétrissent et les dépouillent ! Qu’ils soient comme des forêts désolées ! — Et puissent les maladies sucer leur sang perfide ! — Sur ce, adieu et prospère.

flavius.

— Oh ! laissez-moi rester et vous consoler, mon maître !

timon.

Si tu redoutes les malédictions, — ne reste pas ; fuis, tandis que tu es béni et sauf. — Ne revois jamais l’homme, et que je ne te revoie jamais.

Ils se séparent.

SCÈNE XIV.
[Devant la caverne de Timon.]
Entrent le poète et le peintre. Timon les observe, sans être vu.
le peintre.

Si j’ai pris bonne note de l’endroit, sa demeure ne doit pas être éloignée.

le poète.

Que faut-il penser de lui ? Devons-nous tenir pour vraie la rumeur qu’il regorge d’or ?

le peintre.

C’est certain. Alcibiade l’affirme ; Phryné et Timandra ont eu de l’or de lui ; il a également enrichi de ses largesses de pauvres soldats maraudeurs. On dit qu’il a donné à son intendant une forte somme.

le poète.

Alors cette banqueroute n’était qu’une feinte pour éprouver ses amis.