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MESURE POUR MESURE.

isabelle.

— Malheureux Claudio ! Misérable Isabelle ! — Monde inique ! Damné Angelo !

Elle pleure.
le duc.

— Tout cela ne saurait le blesser ni vous profiter : — abstenez-vous-en donc ; remettez votre cause au ciel. — Écoutez ce que je dis, et vous en reconnaîtrez — à chaque syllabe l’exacte vérité. — Le duc revient demain… Allons, séchez vos larmes… — Quelqu’un du couvent, son confesseur, — m’a confié ce fait. Déjà il en a porté — l’avis à Escalus et à Angelo, — qui s’apprêtent à le recevoir aux portes — pour lui remettre leurs pouvoirs. Si vous pouvez, mettez votre raison — à la salutaire allure que je désire lui voir prendre, — et vous obtiendrez une satisfaction complète de ce misérable, — la faveur du duc, la vengeance que vous avez à cœur, — et la louange de tous.

isabelle.

Je me laisse diriger par vous.

le duc, lui remettant un pli.

— Eh bien, portez cette lettre à frère Pierre ; — c’est celle où il me mande le retour du duc. — Dites-lui, sur la foi de ce gage, que je désire sa présence — chez Marianne ce soir. La cause de votre amie, la vôtre, — je lui expliquerai tout parfaitement ; il vous conduira — devant le duc, et il accusera Angelo — face à face. Pour moi, pauvre moine, — je suis lié par un vœu sacré, — et je serai absent. Partez, vous, avec cette lettre ; — contenez ces larmes qui brûlent vos yeux, — avec la force d’un cœur serein. Ne vous fiez plus à mon saint ordre, — si j’égare votre marche… Qui est là ?


Entre Lucio.
lucio.

— Bonjour ! Moine, où est le prévôt ?