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SCÈNE II.

Aussi, qu’elle ait des craintes ou qu’elle soit coupable.
Vous ne le connaîtrez plus par son teint.
Car elle a sans cesse sur les joues les couleurs
Qu’elle doit n’avoir que naturellement.

Voilà, maître, de terribles vers contre le blanc et le rouge.

ARMADO.

Est-ce qu’il n’y a pas, page, une ballade intitulée : Le Roi et la mendiante (33) ?

PHALÈNE.

Le monde s’est rendu coupable d’une ballade de ce genre, il y a quelque trois cents ans ; mais je pense qu’à présent elle serait impossible à retrouver ; ou, fut-elle retrouvée, elle ne pourrait servir ni pour les paroles ni pour la musique.

ARMADO.

Je veux faire remettre en vers ce sujet-là, afin de pouvoir justifier mon écart par quelque précédent considérable. Page, j’aime cette paysanne que j’ai surprise dans le parc avec cette raisonnable brute de Trogne ; après tout, c’est une digne fille.

PHALÈNE, à part.

Oui, digne d’être fouettée, et aussi d’avoir pour amant mieux que mon maître.

ARMADO.

Chante, page ; l’amour met un poids sur mon cœur.

PHALÈNE.

C’est fort étonnant, puisque vous aimez une fille si légère.

ARMADO.

Allons, chante.

PHALÈNE.

Attendez que la compagnie qui nous vient soit passée.