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LA SAUVAGE APPRIVOISÉE.

CATHARINA.

— Je n’en veux pas de plus grande ; celle-ci est à la mode, — les gentilles femmes portent ces toques-là.

PETRUCHIO.

— Quand vous serez gentille, vous en aurez une aussi, mais pas avant.

HORTENSIO, à part.

Ce ne sera pas de sitôt.

CATHARINA.

— Ah çà, monsieur, je compte bien qu’il me sera permis de parler, — et je parlerai ; je ne suis pas une enfant ni un poupon. — Des gens qui valaient mieux que vous ont enduré ma franchise ; — si vous ne le pouvez pas, bouchez-vous les oreilles. — Il faut que ma langue exprime le ressentiment de mon cœur, — ou que mon cœur se brise en le comprimant. — Plutôt que de m’exposer à cela, je prendrai — en paroles toute la liberté qui me plaît.

PETRUCHIO.

— Ma foi, tu dis vrai ; cette toque est affreuse : — une croûte de pâté ! une billevesée ! un pâté de soie ! — Je t’aime de ne pas aimer cela.

CATHARINA.

— Aimez-moi, ou ne m’aimez pas, j’aime cette toque ; — et je l’aurai et je n’en veux pas d’autre.

PETRUCHIO.

— La robe, à présent ?… Allons, tailleur, montre-nous-la ! — Ô mon Dieu ! miséricorde ! quelle est cette mascarade !… — Qu’est cela ! une manche ? C’est comme une bombarde ! — Quoi, du haut en bas, découpée comme une tarte aux pommes ! — Piquée et surpiquée, taillée, crevée et trouée, — comme une chaufferette dans la boutique d’un barbier ! — Au nom du diable, tailleur, comment appelles-tu ça ?