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ROMÉO ET JULIETTE.

LAURENCE.

— Laisse-moi discuter avec toi sur ta situation.

ROMÉO.

— Tu ne peux pas parler de ce que tu ne sens pas. — Si tu étais jeune comme moi et que Juliette fût ta bien-aimée, — si, marié depuis une heure, tu avais tué Tybalt, — si, tu étais éperdu comme moi et comme moi banni, — alors tu pourrais parler, alors tu pourrais t’arracher les cheveux, — et te jeter contre terre, comme je fais en ce moment, — pour y prendre d’avance la mesure d’une tombe !

Il s’affaisse à terre. On frappe à la porte.
LAURENCE.

— Lève-toi, on frappe… Bon Roméo, cache-toi.

ROMÉO.

— Je ne me cacherai pas ; à moins que mes douloureux soupirs — ne fassent autour de moi un nuage qui me dérobe aux regards !

On frappe encore.
LAURENCE.

— Entends-tu comme on frappe ?… Qui est là ?… Roméo, lève-toi, — tu vas être pris… Attendez un moment… Debout ! — Cours à mon laboratoire !…

On frappe.

Tout à l’heure !… Mon Dieu ! — quelle démence !…

On frappe.

J’y vais, j’y vais !

Allant à la porte.

— Qui donc frappe si fort ? D’où venez-vous ? que voulez-vous ?

LA NOURRICE, du dehors.

— Laissez-moi entrer et vous connaîtrez mon message. — Je viens de la part de madame Juliette.

LAURENCE, ouvrant.

Soyez la bienvenue, alors.