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ROMÉO ET JULIETTE.

débrouiller sans encourir malheur. — C’est la stryge qui, quand les filles sont couchées sur le dos, — les étreint et les habitue à porter leur charge — pour en faire des femmes à solide carrure. — C’est elle (57)…

ROMÉO.

Paix, paix, Mercutio, paix. — Tu nous parles de riens !

MERCUTIO.

En effet, je parle des rêves, — ces enfants d’un cerveau en délire, — que peut seule engendrer l’hallucination, — aussi insubstantielle que l’air, — et plus variable que le vent qui caresse — en ce moment le sein glacé du nord, — et qui tout à l’heure, s’échappant dans une bouffée de colère, — va se tourner vers le midi encore humide de rosée !

BENVOLIO.

— Ce vent dont vous parlez nous emporte hors de nous-mêmes : — le souper est fini et nous arriverons trop tard.

ROMÉO.

— Trop tôt, j’en ai peur ! Mon âme pressent — qu’une amère catastrophe, encore suspendue à mon étoile, — aura pour date funeste — cette nuit de fête, et terminera — la méprisable existence contenue dans mon sein — par le coup sinistre d’une mort prématurée. — Mais que celui qui est le nautonnier de ma destinée — dirige ma voile !… En avant, joyeux amis !

BENVOLIO.

— Battez, tambours !

Ils sortent.