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ROMÉO ET JULIETTE.

JULIETTE.

Me voici, madame. — Quelle est votre volonté ?

LADY CAPULET.

— Voici la chose… Nourrice, laisse-nous un peu ; — nous avons à causer en secret…

La nourrice va pour sortir.

Non, reviens, nourrice ; — je me suis ravisée, tu assisteras à notre conciliabule. — Tu sais que ma fille est d’un joli âge.

LA NOURRICE.

— Ma foi, je puis dire son âge à une heure près.

LADY CAPULET.

— Elle n’a pas quatorze ans.

LA NOURRICE.

Je parierais quatorze de mes dents, — et, à ma grande douleur je n’en ai plus que quatre, — qu’elle n’a pas quatorze ans… Combien y a-t-il d’ici à la Saint-Pierre-ès-Liens.

LADY CAPULET.

Une quinzaine au moins ?

LA NOURRICE.

— Au moins ou au plus, n’importe ! — Entre tous les jours de l’année, c’est précisément — la veille au soir de la Saint-Pierre-ès-Liens qu’elle aura quatorze ans. — Susanne et elle, Dieu garde toutes les âmes chrétiennes ! — étaient du même âge… Oui, à présent, Susanne est avec Dieu ; — elle était trop bonne pour moi ; mais, comme je disais, — la veille au soir de la Saint-Pierre-ès-Liens elle aura quatorze ans ; — elle les aura, ma parole. Je m’en souviens bien. — Il y a maintenant onze ans du tremblement de terre ; — et elle fut sevrée, je ne l’oublierai jamais, — entre tous les jours de l’année, précisément ce jour-là ; — car j’avais mis de l’absinthe au bout de