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INTRODUCTION.

ser, et vieille, par Milton, — la comtesse de Derby eut l’idée magnifique de donner à la reine une fête qui rappellerait les merveilles de Kenilworth. Elle avait, à quelques milles de Londres, près d’Uxbridge, un manoir féodal récemment acheté à la noble famile de Newdegate, qui, pour être moins fort et moins crénelé que le château de Leicester, n’en était pas moins beau. Ce fut dans ce manoir, placé au milieu de la plus riante nature, sur une éminence qui domine le cours d’une rivière, que la comtesse offrit à la reine sa splendide hospitalité. La reine accepta l’invitation et accorda pour trois jours son auguste désœuvrement. Le vendredi 28 juillet, elle partit du palais de Greenwich, se dirigeant sur Lambeth, qui la salua au passage de tous les carillons de ses églises, puis traversa la Tamise et atteignit Chiswich, où elle coucha. Le lendemain, elle se remit en marche, et, après avoir fait une halte à Harlington, arriva vers le crépuscule devant le manoir de Harefield, où la comtesse de Derby l’attendait.

Élisabeth s’arrêta un instant à la grille du parc pour écouter une scène de comédie, assez peu comique, où étaient censés figurer un procureur et une laitière, longea la grande avenue[1] et enfin descendit de cheval devant le perron du château. Au haut de ce perron, une estrade avait été préparée pour elle. La reine s’assit là sur un trône et fut obligée d’écouter un petit dialogue de circonstance que récitèrent devant elle deux personnages allégoriques, le Lieu et le Temps : — l’un, vêtu d’une houppelande à carreaux, représentait une maison en briques ; l’autre, affublé d’une perruque jaune et

  1. De cette avenue qui depuis a pris le nom de Queen’s Walk, il ne reste plus aujourd’hui que quatre arbres. Quant au vieux manoir de Harefield, il a été détruit en 1660 par un incendie, et c’est à peine si l’on peut encore en reconnaître les ruines.