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OTHELLO.
— tu dis plus ou moins que la vérité, — tu n’es pas un soldat !
IAGO, à Montano.

Ne me touchez pas de si près… — J’aimerais mieux avoir la langue coupée — que de faire tort à Michel Cassio ; — mais je suis persuadé que je puis dire la vérité — sans lui nuire en rien, voici les faits, général : — tandis que nous causions, Montano et moi, — arrive un individu criant au secours ! — et, derrière lui, Cassio, l’épée tendue, — prêt à le frapper. Alors, seigneur,

Montrant Montano.

Ce gentilhomme — s’interpose devant Cassio et le supplie de s’arrêter. — Moi, je me mets à la poursuite du criard — pour l’empêcher, comme cela est arrivé, — d’effrayer la ville par ses clameurs. Mais il avait le pied si leste — qu’il a couru hors de ma portée, et je suis revenu d’autant plus vite — que j’entendais le cliquetis et le choc des épées — et Cassio qui jurait très-fort : ce que jusqu’ici — il n’avait jamais fait, que je sache. Quand je suis rentré, — et ce n’a pas été long, je les ai trouvés l’un contre l’autre, — en garde et ferraillant, exactement comme ils étaient — quand vous êtes venu vous-même les séparer. — Je n’ai rien à dire de plus, — si ce n’est que les hommes sont hommes, et que les meilleurs s’oublient parfois. — Quoique Cassio ait eu un petit tort envers celui-ci — (on sait que les gens en rage frappent ceux à qui ils veulent le plus de bien), — il est certain, selon moi, que Cassio — a reçu du fuyard quelque outrage excessif — que la patience ne pouvait supporter.

OTHELLO.

Je le vois, Iago, — ton honnêteté et ton affection atténuent cette affaire — pour la rendre légère à Cassio… Cassio, je t’aime, — mais désormais tu n’es plus de mes officiers.