Page:Shakespeare - Œuvres complètes, traduction Hugo, Pagnerre, 1868, tome 5.djvu/253

Cette page a été validée par deux contributeurs.
249
SCÈNE II.

SCÈNE II.
[Venise. La place de l’Arsenal. Il fait toujours nuit.]
Entrent Iago, Othello et plusieurs domestiques.
IAGO.

— Bien que j’aie tué des hommes au métier de la guerre, — je regarde comme l’étoffe même de la conscience — de ne pas commettre de meurtre prémédité ; je ne sais pas être inique — parfois pour me rendre service : neuf ou dix fois, — j’ai été tenté de le trouer ici, sous les côtes.

OTHELLO.

— Les choses sont mieux ainsi.

IAGO.

— Non, mais il bavardait tant ! il parlait en termes si ignobles et si provocants — contre Votre Honneur, — qu’avec le peu de sainteté que vous me connaissez, — j’ai eu grand-peine à le ménager. Mais, de grâce, monsieur, — êtes-vous solidement marié ? Soyez sûr — que ce Magnifique est très-aimé : — il a, par l’influence, une voix aussi puissante que — celle du doge. Il vous fera divorcer. — Il vous opposera toutes les entraves, toutes les rigueurs — pour lesquelles la loi, tendue de tout son pouvoir, — lui donnera de la corde.

OTHELLO.

Laissons-le faire selon son dépit. — Les services que j’ai rendus à Sa Seigneurie — parleront plus fort que ses plaintes. On ne sait pas tout encore : — quand je verrai qu’il y a honneur à s’en vanter, — je révélerai que je tiens la vie et l’être — d’hommes assis sur un trône ; et