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CYMBELINE.
d’autres pourront avoir le nez aussi crochu, mais pas un, le bras si roide !…
CYMBELINE.

— Mon fils, laissez finir votre mère.

CLOTEN.

Nous en avons encore beaucoup parmi nous qui ont la poignée aussi dure que Cassibelan. Je ne dis pas que je suis du nombre, mais j’ai un bras. Comment ! Un tribut ! pourquoi payerions-nous un tribut ? Si César peut nous cacher le soleil avec une couverture ou mettre la lune dans sa poche, nous lui payerons tribut pour avoir de la lumière : sinon, monsieur, assez parlé de tribut, je vous prie !

CYMBELINE.

— Vous devez savoir — qu’avant que les Romains injurieux eussent extorqué — ce tribut de nous, nous étions libres. L’ambition de César, — qui se gonflait presque à élargir — les flancs du monde, en dépit de toute justice, nous imposa ce joug ; le secouer — est le devoir d’un peuple belliqueux, comme nous prétendons — l’être. Donc nous disons ici à César — qu’il était notre ancêtre, ce Mulmutius qui — établit nos lois, coutumes trop longtemps mutilées — par l’épée de César, et que leur restauration libératrice — sera le grand acte du pouvoir que nous tenons, — quelque colère qu’en ait Rome. Oui, il fit nos lois, ce Mulmutius — qui, le premier en Bretagne, mit — sur son front une couronne d’or, et se nomma — roi (6) !

LUCIUS.

Je suis fâché, Cymbeline, — d’avoir à déclarer César, — qui as plus de rois à son service que tu n’as — d’officiers dans ta maison, César Auguste, ton ennemi. — Apprends donc cela de moi. Au nom de César, — je proclame contre toi la guerre et la confusion : attends-toi —