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SCÈNE II.

PANDARUS.

Eh bien, c’est le poil blanc qu’Hélène venait de découvrir au menton de Troylus.

CRESSIDA.

Ah ! si c’eût été un poil vert, j’en aurais ri moi-même.

PANDARUS.

Il n’ont pas tant ri du poil que de la jolie réponse de Troylus.

CRESSIDA.

Quelle est donc cette réponse ?

PANDARUS.

« Tiens, lui a dit Hélène, il n’y a que cinquante et un poils à votre menton, et il y en a un blanc ! »

CRESSIDA.

C’était là sa question ?

PANDARUS.

Oui, n’en faites pas question, « Cinquante et un poils, a-t-il reparti, dont un blanc ? Eh ! le poil blanc, c’est mon père, et tous les autres sont ses fils. — Jupiter ! a-t-elle répliqué, lequel de ces poils Pâris, mon époux ? — Le poil biscornu, a-t-il répondu ; arrachez-le et donnez-le-lui ! » Mais il y eut de tels rires, et Hélène rougit tant, et Pâris ragea tant, et tout le reste rit tant, que c’était indescriptible.

CRESSIDA.

Allons, laissons cela ; assez causé sur ce sujet.

PANDARUS.

Ah çà ! ma nièce, je vous ai dit une chose hier ; pensez-y.

CRESSIDA.

C’est ce que je fais.

PANDARUS.

Je vous jure que c’est vrai. Il pleure sur vous comme s’il était né en avril.