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LE CONTE D’HIVER.
reine : en traversant — votre galerie, nous avons été charmés — des raretés qu’elle renferme ; mais nous n’avons pas aperçu — ce que ma fille est venue voir, — la statue de sa mère.
PAULINE.

Vivante, elle était sans égale ; — de même, j’en suis sûre, son image morte — surpasse tout ce que vous avez encore vu — ou tout ce que la main de l’homme a jamais fait : voilà pourquoi je la garde — seule et à part… C’est ici qu’elle est ; préparez-vous à voir — la vie parodiée aussi réellement que le fut jamais — la mort par le sommeil paisible. Regardez, et dites que c’est beau.

Elle écarte un rideau et découvre Hermione immobile comme une statue.

— J’aime votre silence, il n’atteste que mieux votre surprise. Mais parlez pourtant, vous d’abord, monseigneur ; — ne trouvez-vous pas une certaine ressemblance ?

LÉONTE.

C’est bien sa pose naturelle ! — accuse-moi, chère pierre, que je puisse dire, vraiment, — que tu es Hermione ; non, tu es elle bien plutôt — en ne m’accusant pas ; car elle était aussi douce — qu’enfance et grâce !… Mais cependant, Pauline, — Hermione n’avait pas tant de rides, elle n’était pas — aussi âgée qu’elle le paraît ici.

POLIXÈNE.

Oh ! non, à beaucoup près.

PAULINE.

— Le génie du statuaire n’en est que plus grand : — il l’a vieillie de seize ans et l’a représentée telle — que si elle vivait encore.

LÉONTE.

Oui, si elle vivait encore, — offrant à mes yeux un spectacle aussi consolant que celui-ci — est cruel pour