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SCÈNE VII.

d’empoisonner — mon ami Polixène, et la chose eût été faite, — si la bonne âme de Camillo n’avait retardé — les violences de ma volonté. En vain, je l’avais tour à tour menacé de mort et encouragé par des promesses, — soit qu’il obéît, soit qu’il désobéît. Lui, plein d’humanité — et d’honneur, il a ouvert à mon hôte royal — le secret de mes desseins ; il a renoncé à la haute fortune — que vous lui saviez ici ; et il s’est exposé — aux risques certains de toutes les incertitudes, — sans autre richesse que son honneur. Oh ! comme — la rouille de ma vertu fait briller la sienne ! et comme sa piété — noircit mes actions !

Pauline rentre précipitamment.
PAULINE.

Malédiction ! — Oh ! coupez mon lacet, ou mon cœur va le rompre — en se brisant !

PREMIER SEIGNEUR.

Quel est donc cet accès, madame ?

PAULINE, à Léonte.

— Quels tourments étudiés, tyran, as-tu pour moi ? — Quelles roues, quels chevalets, quels bûchers, quelles claies ? Où est le plomb — fondu ? Où est l’huile bouillante ? Quelle torture, vieille ou nouvelle, — dois-je recevoir pour des paroles dont chacune mérite — l’essai de ton pire supplice ? Ta tyrannie — a agi de concert avec tes jalousies, — ces caprices trop puérils pour des enfants, trop naïfs et trop futiles — pour des filles de neuf ans ! Songe, oh ! songe à ce qu’elles ont fait, — et alors deviens vraiment fou, fou frénétique ! Car toutes — tes extravagances passées ne sont que les germes de celle-là ! — Ce n’était rien que tu eusses trahi Polixène — et que tu te fusses montré d’une stupide inconstance