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SCÈNE XI.
connaît la chaleur d’un lit luxurieux ! — Sa rougeur est celle de la honte, et non de la pudeur !
LÉONATO.

— Que prétendez-vous, comte ?

CLAUDIO.

Ne pas être marié, — ne pas lier mon âme à une impure avérée !

LÉONATO.

— Cher seigneur, si, la mettant vous-même à l’épreuve, — vous avez vaincu les résistances de sa jeunesse, — et triomphé de sa virginité…

CLAUDIO.

— Je vous comprends. Si je l’ai connue, — allez-vous dire, c’est comme son mari qu’elle m’a eu dans ses bras, — et vous excuserez cette anticipation vénielle ! — Non, Léonato, — je ne l’ai jamais tentée par un propos trop libre : — je lui ai toujours montré, comme un frère à sa sœur, — un dévouement timide, une décente affection.

HÉRO.

— Vous ai-je donc jamais semblé animée d’autres sentiments ?

CLAUDIO.

— À bas les semblants ! je veux les dénoncer : — vous me semblez telle que Diane dans sa sphère, — aussi chaste qu’un bouton de fleur non-épanoui encore ; — mais vous avez plus de fureurs dans votre sang — que Vénus ou que ces bêtes repues — que met en rut une sensualité sauvage.

HÉRO.

— Monseigneur est-il malade pour divaguer ainsi ?

LÉONATO, à don Pedro.

— Doux prince, pourquoi ne parlez-vous pas ?

DON PEDRO.

Que pourrais-je dire ? — je suis déshonoré, moi qui