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TROYLUS ET CRESSIDA.

TROYLUS.

— C’est notre folle sœur, je reconnais sa voix.

CASSANDRE, du dehors.

— Pleurez, Troyens !

HECTOR.

C’est Cassandre.

Entre Cassandre échevelée.
CASSANDRE.

— Pleurez, Troyens, pleurez ! Prêtez-moi dix mille yeux, — et je les remplirai de larmes prophétiques.

HECTOR.

— Silence, ma sœur, silence !

CASSANDRE.

— Vierges, adolescents, hommes faits, vieillards ridés, — douce enfance qui ne peut que crier, — ajoutez à mes clameurs ! Payons d’avance — une partie de cette masse de sanglots à venir ! — Pleurez, Troyens, pleurez ! exercez vos yeux aux larmes ! — Troie ne doit pas subsister ; la splendide Ilion ne doit pas rester debout ! — Pâris, notre frère, est la torche qui nous brûle tous (11). — Pleurez, Troyens, pleurez ! Criez ! criez : Hélène et malheur ! Troie brûle, si Hélène ne part pas !

Elle sort (12).
HECTOR.

— Eh bien, jeune Troylus, ces accents — prophétiques de notre sœur ne vous causent-ils pas — quelques frémissements de remords ? ou bien votre sang — est-il si follement ardent que ni le langage de la raison — ni la crainte d’un mauvais succès dans une mauvaise cause — ne puissent le calmer ?

TROYLUS.

Je dis, frère Hector, — que ce n’est pas l’événement