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NOTES.

diverses qui, après avoir troublé la cité juive de leurs querelles, se réconcilièrent à l’approche de l’ennemi commun, l’empereur Titus. Malone cite à ce sujet un extrait d’un ouvrage traduit de l’hébreu, intitulé : Derniers temps de la république des Juifs, ouvrage que Shakespeare a pu avoir sous les yeux.

(30) Cette madame Blanche, qu’Hubert voudrait voir mariée au Dauphin Louis, n’est autre que la fameuse Blanche de Castille, mère de Louis IX. Elle était, comme chacun sait, fille d’Alphonse IX, roi de Castille, et nièce du roi Jean.

(31) Ce monologue superbe et toujours actuel, où le poëte flétrit l’inconstance de la France, dominée par ce faiseur de faux serments, l’Intérêt, avait un singulier à-propos à la fin du seizième siècle, soit qu’il fût dit au moment où un prince du sang français, le duc d’Anjou, proposait d’épouser la reine Élisabeth, geôlière de sa belle-sœur Marie Stuart, soit qu’il fût dit après la conversion de Henri IV abjurant sa foi et déclarant que Paris vaut bien une messe, soit qu’il fût dit après la conclusion de la paix entre la cour de France et Philippe II.

(32) Pour bien voir à quel point le drame primitif imprimé en 1591, — quelque remarquable qu’il soit du reste, — est inférieur au drame définitif publié en 1623, il faut comparer cette superbe scène du Roi Jean, où l’enfant essaie vainement de consoler sa mère, avec la scène parallèle qui se trouve dans la pièce anonyme. Faites le rapprochement, et jugez :

Extrait de la pièce de 1591.
ARTHUR.

Madame, prenez courage : ces langueurs abattues — ne sont pas le baume qui adoucira notre triste destinée. — Si le ciel a ordonné ces événements, cette amère mélancolie ne sert de rien. — Les saisons changeront : de même, notre malheur présent — peut changer avec elles, et tout peut tourner à bien.

CONSTANCE.

— Ah ! enfant ! tes années, je le vois, sont trop tendres — pour que tu puisses sonder du regard l’abîme de ces douleurs. — Mais moi, qui vois s’écrouler ta fortune, mes espérances et les ressources — avec lesquelles devaient se fonder ta fortune et ta renommée, — quelle joie, quelle satisfaction, quel repos puis-je goûter, — quand l’espérance et la fortune nous abandonnent ?