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aimons l’Angleterre, et c’est pour le salut de l’Angleterre — que nous suons ici sous le poids de notre armure. — La tâche que nous avons devrait être ta besogne, à toi ; — mais tu es si loin d’aimer l’Angleterre — que tu as renversé son roi légitime, — rompu l’ordre de succession, — bravé le pouvoir enfant, et violé — la virginale vertu de la couronne !
Montrant Arthur.

— Tiens, reconnais-tu le visage de ton frère Geoffroy ? — Ces yeux, ce front, ont été moulés sur les siens : — ici est résumée en petit — la grandeur qui mourut en Geoffroy, et la main du temps — donnera à cet abrégé d’aussi augustes proportions. — Ce Geoffroy naquit ton frère aîné, — et voici son fils. L’Angleterre était le droit de Geoffroy, — et le droit de Geoffroy est celui d’Arthur, par la grâce de Dieu. — Comment se fait-il donc que tu sois appelé roi, — quand le sang de la vie bat encore dans ces tempes — à qui est due la couronne que tu t’arroges ?

LE ROI JEAN.

— De qui donc, France, tiens-tu ce haut pouvoir — d’exiger de moi une réponse à tes questions ?

PHILIPPE.

— De ce Juge suprême qui fait naître — au cœur d’un pouvoir fort — la bonne pensée d’examiner les taches et les affronts faits au droit. — Ce Juge m’a fait le gardien de cet enfant : — c’est avec sa sanction que j’accuse ton forfait, — et par son aide que je prétends le châtier.

LE ROI JEAN.

— Fi ! tu usurpes l’autorité.

PHILIPPE.

— Excuse… j’abats un usurpateur.

LA REINE-MÈRE, à Philippe.

— Qui donc appelles-tu usurpateur, France ?