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20 août 1589 au château de Kronenberg, dans l’île de Zélande.

Il ne restait plus qu’à ramener la nouvelle reine en Écosse, et ce fut le premier marin danois, l’amiral Pierre Munck, qui fut chargé de cette importante mission. La reine Anne s’embarqua sur le vaisseau amiral qu’escortaient onze bâtiments de guerre, destinés à tenir en respect les croisières anglaises. Cette belle escadre mit à la voile le 2 septembre 1589.

La traversée avait été favorable, et les signaux de la côte de Fife annonçaient déjà l’arrivée de la flottille, lorsque le vent changea tout à coup et souffla de l’ouest avec une violence extraordinaire. L’amiral, qui touchait au golfe d’Édimbourg, crut à un simple orage et voulut tenir, en mettant à la cape et en courant des bordées. Efforts inutiles. La bourrasque devint une tempête qui ne se calma que lorsque l’escadre royale eut regagné la côte de Norwége. L’amiral, qui était un brave, ne se découragea pourtant pas. Il profita d’une brise nord-est qui venait de s’établir pour remettre à la voile. Portée par le plus doux zéphir, la flotte danoise arriva de nouveau en vue des côtes d’Écosse. Cette fois, l’amiral Munck avait accompli sa mission, et déjà il montrait triomphalement à la jeune reine les rives de ses États, lorsque, contre toute attente, voici cet infernal vent d’ouest qui se remet à souffler de plus belle. L’amiral veut lutter contre le vent. Il oppose à l’ennemi ses plus belles manœuvres. Vaine tactique. La tempête l’emporte et pour la seconde fois repousse l’escadre jusque sur les côtes de Norwége.

L’amiral Munck, qui avait juré d’amener la jeune reine en Écosse, était profondément humilié. Il fallait à tout prix qu’il expliquât sa double défaite pour ne pas perdre sa réputation de loup de mer. Il déclara donc que l’équinoxe ne justifiait pas la résistance obstinée du vent,