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Je traduis ici, pour la première fois, cet épisode éminemment dramatique d’une œuvre inconnue. La scène se passe dans le laboratoire de Bacon ; le sorcier y est enfermé avec son compère Bungay ; on frappe à la porte, et Bungay va ouvrir.

BACON.

Qui est là ?

BUNGAY.

Deux étudiants qui désirent vous parler.

BACON.

Faites entrer.

Entrent deux étudiants.

Eh bien, mes enfants, que voulez-vous ?

PREMIER ÉTUDIANT.

Seigneur, nous sommes tous deux de Suffolk, amis et voisins de campagne. Nos pères sont de riches chevaliers dont les terres se touchent. Le mien demeure à Crackfield et le sien à Laxfield. Nous sommes camarades de collége, des frères jurés ! Et nous nous aimons comme nos pères s’aiment.

BACON.

Où voulez-vous en venir ?

DEUXIÈME ÉTUDIANT.

Nous avons appris que votre honneur garde en sa cellule un miroir dans lequel les hommes peuvent voir tout ce que souhaite leur pensée ou leur cœur. Nous venons savoir comment se portent son père et le mien.

BACON.

Mon miroir est à la disposition de tout honnête homme. Asseyez-vous, et vous allez voir comment vont vos chers pères. En attendant, dites-moi vos noms.

PREMIER ÉTUDIANT.

Je me nomme Lambert.

SECOND ÉTUDIANT.

Et moi, Serlsby.

BACON, à part, à Bungay.

Bungay, je flaire quelque tragédie.

On aperçoit au fond du théâtre Lambert et Serlsby, pères des deux étudiants. Tous deux ont l’épée à la main.
LAMBERT.

Tu es exact comme un homme, Serlsby, et tu es digne de ton titre de chevalier. Cette preuve d’affection et d’amour que tu donnes à ta maîtresse indique la valeur de ton sang. Tu te rappelles les mots échangés à Fressingfield : ce sont des bravades honteuses qu’un homme d’honneur ne peut supporter. Quant à