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ACTE III, SCÈNE I.

métellus cimber. — Ô César !

césar. — Loin de moi. Veux-tu ébranler l’Olympe ?

décius. — Grand César !

césar. — Brutus n’a-t-il pas fléchi le genou en vain ?

casca. — Mon bras parle pour moi !

(Casca frappe César au cou. César lui saisit le bras : il est alors frappé par plusieurs autres conjurés, et enfin par Marcus Brutus.)

césar. — Et tu, Brute[1] ? — Alors tombe, César.

(Il meurt. Les sénateurs et le peuple se retirent en tumulte.)

cinna. — Liberté ! délivrance ! La tyrannie est morte. Courez, allez le proclamer, le crier dans toutes les rues.

cassius. — Quelques-uns de vous aux tribunes. Allez et criez : Liberté ! délivrance ! affranchissement !

brutus. — Peuple et sénateurs, ne vous effrayez point, ne fuyez point, restez à vos places : la dette de l’ambition est acquittée.

casca. — Allez à la tribune, Brutus.

décius. — Et Cassius aussi.

brutus. — Où est Publius ?

cinna. — Le voici, tout consterné de ce soulèvement.

métellus cimber. — Demeurons fermes tous ensemble, de crainte que quelques amis de César n’essayent…

brutus. — Ne parle point de demeurer. — Publius, point d’abattement ; on n’a le dessein de vous faire aucun mal, ni à aucun autre Romain. Annoncez-le à tous, Publius.

cassius. — Et quittez-nous, Publius, de peur que ce peuple, en fondant sur nous, ne mette votre vieillesse en danger.

brutus. — Oui, éloignez-vous, et que nul homme n’ait

  1. Suétone rapporte seulement comme un ouï dire, auquel même il n’ajoute pas foi, que César dit en grec à Brutus καὶ σὺ, τέκνον, et toi aussi mon fils. Les historiens ont depuis naturalisé ce mot en latin, et en ont fait le et tu, Brute, mot devenu si populaire, que Shakspeare n’imagina pas probablement qu’il fût permis de le faire passer dans une autre langue. Il est assez singulier que Voltaire n’ait pas fait mention de cette bizarrerie.