HÉRO. — Monseigneur se porte-t-il bien qu’il tienne des discours si extravagants ?
LÉONATO. — Généreux prince, pourquoi ne parlez-vous pas ?
DON PÈDRE. — Que pourrai-je dire ? Je reste déshonoré par les soins que j’ai pris pour unir mon digne ami à une vile courtisane.
LÉONATO. — Dit-on réellement ces choses, ou est-ce que je rêve ?
DON JUAN, – On le dit, seigneur, et elles sont vraies.
BÉNÉDICK. — Ceci n’a pas l’air d’une noce.
HÉRO. — Vraies ! ô Dieu !
CLAUDIO. — Léonato, suis-je debout ici ? Est-ce là le prince ? Est-ce là le frère du prince ? Ce front est-il celui d’Héro ? Nos yeux sont-ils à nous ?
LÉONATO. — Oui sans doute ; mais qu’en résulte-t-il, seigneur ?
CLAUDIO. — Laissez-moi adresser une seule question à votre fille, et par ce pouvoir paternel que la nature vous donne sur elle, commandez-lui de répondre avec vérité.
LÉONATO. — Je te l’ordonne comme tu es mon enfant.
HÉRO. — Ô Dieu, défendez-moi ! Comme je suis assiégée ! À quel interrogatoire suis-je donc soumise ?
CLAUDIO. — À répondre fidèlement au nom que vous portez.
HÉRO. — Ce nom n’est-il pas Héro ? Qui peut le flétrir d’un juste reproche ?
CLAUDIO. — Ma foi, Héro elle-même ! Héro elle-même peut flétrir la vertu d’Héro. Quel homme s’entretenait la nuit dernière avec vous, près de votre fenêtre, entre minuit et une heure ? Maintenant, si vous êtes vierge, répondez à cette question.
HÉRO. — À cette heure-là, seigneur, je n’ai parlé à aucun homme.
DON PÈDRE. — Alors vous n’êtes plus vierge. – Je suis fâché, Léonato, que vous soyez forcé de m’entendre ; sur mon honneur, moi, mon frère et ce comte outragé, nous l’avons vue, nous l’avons entendue la nuit dernière parler, à cette heure même, par la fenêtre de sa chambre,