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ADRIANA.—Les heures reculeraient donc ? Je ne l’ai jamais entendu dire.

DROMIO.—Oh ! oui, vraiment ; quand une des heures rencontre un sergent, elle recule de peur.

ADRIANA.—Comme si le temps était endetté ! tu raisonnes en vrai fou.

DROMIO.—Le temps est un vrai banqueroutier, et il doit à l’occasion plus qu’il n’a vaillant. Et, c’est un voleur aussi : n’avez-vous donc pas ouï dire que le temps s’avance comme un voleur jour et nuit ? Si le temps est endetté, et qu’il soit un voleur, et qu’il trouve sur son chemin un sergent, n’a-t-il pas raison de reculer d’une heure dans un jour ?

ADRIANA.—Cours, Dromio, voilà l’argent ; (Luciana revient avec la bourse) porte-le bien vite, et ramène ton maître immédiatement au logis. Venez, ma sœur, je suis atterrée par mon imagination ; mon imagination, qui tantôt me console et tantôt me tourmente !

(Elles sortent.)


Scène III.

Une rue d’Éphèse.

ANTIPHOLUS de Syracuse seul.

Je ne rencontre pas un homme qui ne me salue, comme si j’étais un ami bien connu, et chacun m’appelle par mon nom. Quelques-uns m’offrent de l’argent, d’autres m’invitent à dîner ; d’autres me remercient des services que je leur ai rendus, d’autres m’offrent des marchandises à acheter : tout à l’heure un tailleur m’a appelé dans sa boutique et m’a montré des soieries qu’il avait achetées pour moi ; et LA-dessus il m’a pris mesure.—Sûrement tout cela n’est qu’enchantement, qu’illusions, et les sorciers de la Laponie habitent ici.

(Entre une courtisane.)

DROMIO.—Mon maître, voici l’or que vous m’avez envoyé chercher….. Quoi ! vous avez fait habiller de neuf le portrait du vieil Adam ?