Page:Shakespeare - Œuvres complètes, traduction Guizot, Didier, 1864, tome 2.djvu/16

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
14
JULES CÉSAR.

césar. — Partez, et n’omettez aucune cérémonie.

(Musique.)

le devin. — César !

césar. — Ha ! qui m’appelle ?

casca, s’adressant à ceux qui l’environnent. — Commandez que tout bruit cesse. Encore une fois, silence !

(La musique s’arrête.)

césar. — Qui est-ce, dans la foule, qui m’appelle ainsi ? J’entends une voix, plus perçante que tous les instruments de musique crier César ! Parle, César se tourne pour entendre.

le devin. — Prends garde aux ides de mars.

césar. — Quel est cet homme ?

brutus. — Un devin qui vous avertit de prendre garde aux ides de mars.

césar. — Amenez-le devant moi, que je voie son visage.

casca. — Mon ami, sors de la foule, regarde César.

césar. — Qu’as-tu à me dire maintenant ? Répète encore.

le devin. — Prends garde aux ides de mars.

césar. — C’est un visionnaire ; laissons-le, passons.

(Les musiciens exécutent un morceau.)
(Tous sortent, excepté Brutus et Cassius.)

cassius. — Irez-vous voir l’ordre de la course ?

brutus. — Moi ? non.

cassius. — Je vous en prie, allez-y.

brutus. — Je ne suis point un homme de divertissements ; je n’ai pas tout à fait la vivacité d’Antoine. Que je ne vous empêche pas, Cassius, de suivre votre intention ; je vais vous laisser.

cassius. — Brutus, je vous observe depuis quelque temps ; je ne reçois plus de vos yeux ces regards de douceur, ces signes d’affection que j’avais coutume d’en recevoir. Vous tenez envers votre ami, qui vous aime, une conduite trop froide et trop peu cordiale.

brutus. — Ne vous y trompez point, Cassius : si mon regard s’est voilé, ce trouble de mon maintien ne porte que sur moi-même. Je suis tourmenté depuis quelque temps de sentiments qui se contrarient, d’idées qui ne concernent que moi, et donnent peut-être quelque