Page:Shakespeare - Œuvres complètes, traduction Guizot, Didier, 1864, tome 1.djvu/333

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
327
ACTE II, SCÈNE I.

Sébastien.

Ta destinée, cher ami, me servira d’exemple : comme tu gagnas Milan, je veux gagner Naples. Tire ton épée : un seul coup va t’affranchir du tribut que tu payes, et te donner pour roi moi qui t’aimerai.

Antonio.

Tirons ensemble nos épées ; et quand je lèverai mon bras en arrière, faites-en autant pour frapper aussitôt Gonzalo.

Sébastien.

Oh ! un mot encore.

(Ils se parlent bas.)
(Musique. — Ariel rentre invisible.)
Ariel.

Mon maître prévoit par son art le danger que courent ces hommes dont il est l’ami. Il m’envoie pour leur sauver la vie, car autrement son projet est mort.

(Il chante à l’oreille de Gonzalo.)

Tandis que vous dormez ici en ronflant,
La conspiration à l’œil ouvert
Choisit son moment.
Si vous attachez quelque prix à la vie,
Secouez le sommeil et prenez garde.
Réveillez-vous, réveillez-vous.

Antonio.

Maintenant frappons tous deux à la fois.

Gonzalo

À nous, anges gardiens, sauvez le roi !

(Ils s’éveillent.)
Alonzo.

Quoi ! qu’est-ce que c’est ? Oh ! vous êtes réveillés ! pourquoi vos épées nues ? pourquoi ces regards effroyables ?

Gonzalo.

De quoi s’agit-il ?

Sébastien.

Tandis que nous veillions ici à la sûreté de votre sommeil, nous avons entendu tout à coup un bruit sourd de rugissements comme de taureaux, ou plutôt de lions. Ne vous a-t-il pas réveillés ? il a frappé mon oreille de la manière la plus terrible.

Alonzo.

Je n’ai rien entendu.

Antonio.

Oh ! c’était un bruit capable d’effrayer l’o-