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nous avons tous sujet de déplorer l’obscurcissement de l’étoile qui brillait sur nous. Mais nul ne peut guérir ses maux avec des larmes. Madame ma mère, je vous demande pardon : je n’avais pas aperçu Votre Grâce.― Je demande humblement à vos genoux votre bénédiction.

La Duchesse.― Dieu te bénisse et mette dans ton cœur la bonté, la bienveillance, la charité, l’obéissance et la fidélité à ton devoir.

Glocester., à part.― Amen, et qu’il me fasse la grâce de mourir vieux et bon homme ; c’est à cela que tend la bénédiction d’une mère : je suis étonné que Sa Grâce l’ait oublié.

Buckingham. ― Ô vous, princes en deuil, pairs au cœur rempli de tristesse, qui tous partagez le poids de la douleur commune, cherchez maintenant votre consolation dans une amitié réciproque. Nous perdons, il est vrai, la récolte que nous offrait ce roi : mais il nous reste l’espérance de celle que nous promet son fils. Il faut maintenant conserver et maintenir soigneusement l’union et le lien si récemment formés entre vos cœurs naguère gonflés de ressentiments qui viennent d’être apaisés.― Je crois qu’il conviendrait d’envoyer chercher dès à présent le jeune prince qui est à Ludlow, et de l’amener à Londres avec peu de suite pour le faire couronner roi.

Rivers. ― Et pourquoi avec peu de suite, milord de Buckingham ?

Buckingham. ― De peur, milord, que dans une foule considérable les blessures de la haine, trop nouvellement fermées, ne trouvassent occasion de se rouvrir, ce qui serait d’autant plus dangereux que le royaume est dans un état d’enfance, et encore sans maître. Quand chacun des chevaux dispose du frein qui le contient, et peut diriger sa course comme il lui plaît, on doit, à mon avis, prévenir avec autant de soin la crainte du mal que le mal lui-même.

Glocester. ― Je me flatte que le roi nous a tous réconciliés ; et quant à moi, la réconciliation est solide et sincère de ma part.