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AUTOLYCUS.—Mensonge ! Vous êtes rudes et couverts de poil. Ne vous avisez pas de mentir : cela ne convient à personne qu’à des marchands, et ils nous donnent souvent un démenti à nous autres soldats ; mais nous les en payons en monnaie de bonne empreinte et nullement en fer homicide. Ainsi, ils ne nous donnent pas un démenti.

LE FILS.—Votre Seigneurie avait tout l’air de nous en donner si elle ne s’était pas prise sur le fait.

LE BERGER.—Êtes-vous un courtisan, monsieur, s’il vous plaît ?

AUTOLYCUS.—Que cela me plaise ou non, je suis un courtisan ; est-ce que tu ne vois pas un air de cour dans cette tournure de bras ? Est-ce que ma démarche n’a pas en elle la cadence de cour ? Ton nez ne reçoit-il pas de mon individu une odeur de cour ? Est-ce que je ne réfléchis pas sur ta bassesse un mépris de cour ? Crois-tu que, parce que je veux développer, démêler ton affaire, pour cela je ne suis pas un courtisan ? Je suis un courtisan de pied en cap et un homme qui fera avancer ou reculer ton affaire ; en conséquence de quoi je te commande de me déclarer ton affaire.

LE BERGER.—Mon affaire, monsieur, s’adresse au roi.

AUTOLYCUS.—Quel avocat as-tu auprès de lui ?

LE BERGER.—Je n’en connais point, monsieur, sous votre bon plaisir.

LE FILS.—Avocat est un terme de cour pour signifier un faisan. Dites que vous n’en avez pas.

LE BERGER.—Aucun, monsieur. Je n’ai point de faisan, ni coq, ni poule.

AUTOLYCUS, à haute voix.—Que nous sommes heureux, pourtant, de n’être pas de simples gens ! Et pourtant la nature aurait pu me faire ce qu’ils sont ; ainsi je ne veux pas les dédaigner.

LE FILS.—Ce ne peut être qu’un grand courtisan.

LE BERGER.—Ses habits sont riches, mais il ne les porte pas avec grâce.

LE FILS.—Il me paraît à moi d’autant plus noble qu’il est plus bizarre : c’est un homme important, je le garantis,