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et par tous mes efforts, en votre absence je tâcherai d’apaiser le ressentiment de votre père, et de l’amener à approuver votre choix.

FLORIZEL.—Eh ! cher Camillo, comment pourrait s’accomplir cette espèce de miracle ? Apprenez-le-moi, afin que j’admire en vous quelque chose de plus qu’un homme, et qu’ensuite je puisse me fier à vous.

CAMILLO.—Avez-vous pensé à quelque lieu où vous vouliez aller ?

FLORIZEL.—Pas encore. Comme c’est un accident inopiné qui est coupable du parti violent que nous prenons, nous faisons de même profession d’être les esclaves du hasard et de l’impulsion de chaque vent qui souffle.

CAMILLO.—Écoutez-moi donc : voici ce que j’ai à vous dire.—Si vous ne voulez pas absolument changer de résolution, et que vous soyez résolu à cette fuite, faites voile vers la Sicile, et présentez-vous avec votre belle princesse (car je vois qu’elle doit l’être) devant Léontes. Elle sera vêtue comme il convient à la compagne de votre lit. Il me semble voir Léontes vous ouvrant affectueusement ses bras, vous accueillant par ses larmes, vous demandant pardon à vous, qui êtes le fils, comme à la personne même du père, baisant les mains de votre belle princesse, et son cœur partagé entre sa cruauté et sa tendresse, se reprochant l’une avec des malédictions et disant à l’autre de croître plus vite que le temps ou la pensée.

FLORIZEL.—Digne Camillo, quel prétexte donnerai-je à ma visite ?

CAMILLO.—Vous direz que vous êtes envoyé par le roi votre père, pour le saluer et lui donner des consolations. Je veux vous mettre par écrit, seigneur, la manière dont vous devez vous conduire avec lui, et ce que vous devez lui communiquer, comme de la part de votre père, des choses qui ne sont connues que de nous trois ; et ces instructions vous guideront dans ce que vous devrez dire à chaque audience, de sorte qu’il ne s’apercevra de rien, et qu’il croira que vous avez toute la confiance de votre père, et que vous lui révélez son cœur tout entier.