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point de vertu chassée de la cour ; on l’y choie assez pour l’engager à s’y établir, et cependant elle ne fera jamais qu’y séjourner en passant.

AUTOLYCUS.—Oui, monsieur, j’ai voulu dire ses vices ; je connais bien cet homme-là ; il a été depuis porteur de singes ; ensuite, solliciteur de procès, huissier : ensuite, il a fabriqué des marionnettes de l’enfant prodigue, et il a épousé la femme d’un chaudronnier, à un mille du lieu où sont ma terre et mon bien ; après avoir parcouru une multitude de professions malhonnêtes, il s’est établi dans le métier de coquin : quelques-uns l’appellent Autolycus.

LE BERGER.—Malédiction sur lui ! c’est un filou, sur ma vie, c’est un filou : il hante les fêtes de village, les foires et les combats de l’ours.

AUTOLYCUS.—Justement, monsieur, c’est lui ; monsieur, c’est lui ; c’est ce coquin-là qui m’a accoutré comme vous me voyez.

LE BERGER.—Il n’y a pas de plus insigne poltron dans toute la Bohême. Si vous aviez seulement fait les gros yeux, ou que vous lui eussiez craché au visage, il se serait enfui.

AUTOLYCUS.—Il faut vous avouer, monsieur, que je ne suis pas un homme à me battre ; de ce côté-là, je ne vaux rien du tout, et il le savait bien, je le garantirais.

LE BERGER.—Comment vous trouvez-vous à présent ?

AUTOLYCUS.—Mon cher monsieur, beaucoup mieux que je n’étais ; je puis me tenir sur mes jambes et marcher ; je vais même prendre congé de vous, et m’acheminer tout doucement vers la demeure de mon parent.

LE BERGER.—Vous conduirai-je un bout de chemin ?

AUTOLYCUS.—Non, mon bon monsieur ; non, mon cher monsieur.

LE BERGER..—Alors portez-vous bien ; il faut que j’aille acheter des épices pour notre fête de la tonte.

(Il sort.)

AUTOLYCUS seul.—Prospérez, mon cher monsieur.—Votre bourse n’est pas assez chaude à présent pour acheter vos épices. Je me trouverai aussi à votre fête de la tonte,